Lutte contre la pauvreté, budget et crédits: le gouvernement n’a pas de parole

Québec, le jeudi 12 juin 2003 – Le Collectif pour un Québec sans pauvreté dénonce l’attitude du gouvernement Charest qui joue avec la situation intenable des plus pauvres de la société québécoise. Après le ministre de la Santé qui a remis hier aux calendes grecques le retour promis à la gratuité des médicaments pour les personnes assistées sociales aptes au travail et pour les personnes âgées recevant le supplément de revenu garanti, le budget Séguin confirme par son silence total sur la question de la pauvreté la désinvolture du discours inaugural de Jean Charest sur les obligations qui lui sont faites par la loi 112 visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion.

“Le gouvernement manque à ses engagements. À peine 5 M$ sont prévus pour la lutte à la pauvreté sur un budget de 55 MM$ et ceci pour une mesure mineure d’accès des jeunes à l’emploi, fait remarquer Vivian Labrie, porte-parole du Collectif. Pour le reste, c’est un budget complètement opaque qui ne nous permet même pas de vérifier si les prestations d’aide sociale continueront d’être indexées tel que promis. Les premiers gestes du gouvernement Charest ont toutes les apparences d’une correction sur les avancées citoyennes des derniers mois effectuée par un gouvernement très influencé par la pensée magique du tout au marché.”

L’impasse budgétaire simulée ne trompe pas le Collectif qui y voit plutôt une manœuvre pour préparer le terrain du désengagement de l’État et de baisses d’impôt futures. En matière de lutte contre la pauvreté, le déficit humain accumulé par les personnes est autrement plus lourd parce qu’il touche à la couverture de leurs besoins essentiels. Dans ce cas, qui n’avance pas recule. Le budget déposé aujourd’hui pèsera durement sur les conditions de vie des plus pauvres, qui ne trouvent pas leur place en toute dignité dans les priorités budgétaires. On y annule même les maigres annonces du budget de mars dernier. On ne s’occupe pas de la crise du logement. Sur la question de la pauvreté, le gouvernement semble se retrancher dans l’illégalité : le plan d’action dû depuis le 5 mai 2003 au titre de la loi 112 sur la pauvreté ne fait même pas aujourd’hui l’objet des prévisions nécessaires. Il faudra voir demain quelle part y a été faite dans les crédits.

Des engagements fermes qui s’évanouissent

Le Collectif rappelle que pendant la campagne électorale le Parti libéral a réitéré dans une lettre sa ferme intention d’appliquer la loi 112 “parce que c’est l’espoir d’un Québec sans pauvreté de centaines de milliers de personnes”. Dans cette lettre, Jean Charest réaffirmait également son engagement à rétablir la gratuité des médicaments pour l’ensemble des prestataires d’aide sociale et pour les personnes âgées recevant le supplément de revenu garanti, une mesure urgente qu’il était prêt à voter sans attendre quand il était dans l’opposition.

Selon le Collectif, ne pas investir aujourd’hui les 23 M$ nécessaires pour le faire est une économie de bouts de chandelles, parce que c’est prévoir la détérioration conséquente des conditions de santé des plus pauvres. Avec un revenu de 6 276$ par année, une personne à l’aide sociale doit choisir entre manger et se soigner pour payer les 200$ qui lui sont exigés par l’assurance-médicaments. C’est mettre des gens dans des conditions impossibles. Le Collectif rappelle que la nouvelle mesure du panier de consommation établit à environ 11 150$ le montant nécessaire à une personne seule au Québec pour couvrir ses besoins de base, excluant les médicaments.

Le Parti libéral s’est également positionné l’automne dernier en faveur de fixer le montant initial de la prestation minimale d’aide sociale non sujette à coupure qui est prévue par la loi 112 au moins au niveau des prestations actuelles. Les 47 M$ nécessaires ne se retrouvent pas non plus dans le budget.

Les résultats de l’opération budgétaire d’aujourd’hui vont à contre-sens de ces engagements, ceci alors que l’Assemblée nationale, incluant le parti au pouvoir a voté à l’unanimité en décembre une loi 112 visant à tendre vers un Québec sans pauvreté.

Un clause d’impact à appliquer d’urgence

Par ailleurs dans la loi 112 une clause d’impact impose aux ministres concernés de faire état des impacts possibles des mesures qu’ils préconisent sur les conditions de vie des personnes en situation de pauvreté. Compte tenu des impacts “par omission” évidents du budget annoncé aujourd’hui, le Collectif somme le ministre Séguin d’expliquer comment il a fait pour estimer l’impact de ses “non propositions” sur la pauvreté, incluant les reculs sur le budget de mars, et faire état de cet impact.

Le Collectif, qui a modifié cette semaine son nom en celui de Collectif pour un Québec sans pauvreté, prévient que son réseau ne tolérera ni silence ni recul ni statu quo sur la question et promet au gouvernement une résistance en proportion avec les graves erreurs de jugement commises aujourd’hui. Il invite les parlementaires et la population à faire les pressions nécessaires pour le gouvernement applique maintenant la loi qu’il a contribué à faire voter.

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