27 janvier 2017 Lettre ouverte

Augmentation du salaire minimum: Encore des pinottes

L’annonce de la hausse du salaire minimum de 50 cents a amèrement déçu les partenaires de la campagne 5-10-15. Malgré les pressions populaires, le gouvernement a pris une fois de plus le parti des associations patronales et a clairement tourné le dos à notre proposition d’augmenter le salaire minimum à 15$ l’heure. Il a ainsi décidé d’abandonner à leur sort les centaines de milliers de personnes qui n’arrivent tout simplement pas à boucler leurs fins de mois, malgré le fait qu’elles travaillent à temps plein.

Lettre ouverte de Mélanie Gauvin et Virginie Larivière, co-porte-parole de la coalition 5-10-15

S’enfermer à double tour avec le « verrou Fortin »

Au Québec, la proposition théorique de l’économiste Pierre Fortin influence exagérément le taux horaire du salaire minimum. En effet, malgré une méthode d’analyse gouvernementale qui compte cinq axes et treize critères, c’est le critère de M. Fortin, soit le ratio salaire minimum/salaire moyen, qui détermine à lui seul le taux décrété.

Lors de l’annonce de la hausse de 50 cents, la semaine dernière, la ministre Vien a bien précisé que la décision de son gouvernement s’inscrivait dans cette logique. Selon l’économiste catastrophiste, le salaire minimum doit se situer entre 45 et 50 % du salaire horaire moyen, sinon, prévient-il, des milliers d’emplois sont appelés à disparaître. Il est allé jusqu’à dire que d’augmenter le salaire minimum à 15 $ « au Québec, ce serait vraiment une bombe atomique sur le marché de l’emploi » et que ça pourrait engendrer une perte allant jusqu’à 100 000 emplois.

Rappelons que deux études récentes, dont l’une reprend la méthodologie de Fortin en l’actualisant, ne prévoient que des pertes d’emplois marginales (entre 1 et 2 % des emplois rémunérés en deça de 15 $). Ces conséquences négatives pour l’emploi seraient très largement compensées par une augmentation du niveau de vie de près d’un million de travailleurs et travailleuses, augmentation qui permettrait une stimulation directe de l’économie locale.

Sésame ouvre-toi!

Le critère de Pierre Fortin, qu’on appelle le « verrou Fortin », enferme dans la pauvreté les travailleuses et travailleurs rémunéréEs au salaire minimum. Malheureusement, le gouvernement semble avoir perdu la clé de ce verrou idéologique puisque, selon la ministre responsable du Travail, « le salaire minimum sera à 15 $/h quand le salaire moyen sera à 30 $/h ».

L’entêtement du gouvernement à enfermer à double tour dans la pauvreté des centaines de milliers de personnes est absurde. Il est urgent d’analyser la question du salaire minimum du point de vue de la pauvreté des travailleuses et des travailleurs et de mettre fin au phénomène des « travailleurs pauvres », ces personnes qui travaillent toute l’année à temps plein et peinent à couvrir leurs besoins de base.

Faisant écho à cette réalité, le réseau des Banques alimentaires du Québec révélait dans son dernier Bilan-Faim que, parmi ceux et celles qui ont recours à ses services, 10 % ont des revenus d’emploi.

5-10-15

En outre, au moment de l’annonce de la prochaine augmentation du salaire minimum, la ministre responsable du Travail, Dominique Vien, a complètement esquivé l’enjeu de l’amélioration des conditions de travail des travailleuses et des travailleurs. Nous lui avons pourtant présenté deux propositions simples et claires à ce propos. La première revendique que les horaires de travail soient remis au moins cinq jours à l’avance. La deuxième revendique que les travailleuses et travailleurs aient droit à dix jours de congé payé pour maladie ou responsabilités familiales.

Se féliciter d’augmenter le salaire minimum de 50 cents, sans rien proposer par ailleurs pour améliorer les conditions de travail, c’est, ni plus ni moins, se féliciter que des personnes qui travaillent à temps plein demeurent pauvres.

Mélanie Gauvin et Virginie Larivière

 

** La campagne 5-10-15 regroupe le Collectif pour un Québec sans pauvreté, le Front de défense des non-syndiquéEs, la CSD, la CSN, la CSQ et le SFPQ.