Le projet de loi 70, pilot\u00e9 par Fran\u00e7ois Blais, a \u00e9t\u00e9 adopt\u00e9 le 10 novembre dernier sous une pluie d\u2019applaudissements\u2026 et les dos tourn\u00e9s de trois d\u00e9put\u00e9s indign\u00e9s. Le pr\u00e9sident de l\u2019Assembl\u00e9e nationale et plusieurs d\u00e9put\u00e9s ont fait tout un plat de ce geste d\u2019\u00e9clat, le qualifiant d\u2019atteinte au d\u00e9corum et \u00e0 l\u2019institution.<\/p>\n

Tout ce beau monde n\u2019aurait-il pas mieux fait de s\u2019offusquer que le projet de loi 70 constitue une atteinte aux droits de la personne, notamment le droit \u00e0 un revenu d\u00e9cent et le droit de gagner sa vie par un travail librement choisi ou accept\u00e9? Ou de s\u2019offusquer que le projet de loi contourne effront\u00e9ment les principes inscrits dans la Loi visant \u00e0 lutter contre la pauvret\u00e9 et l\u2019exclusion sociale, adopt\u00e9e \u00e0 l\u2019unanimit\u00e9 en 2002? Ou du fait que le ministre Blais a us\u00e9 de d\u00e9magogie pour pr\u00e9senter son projet de loi et d\u00e9cr\u00e9dibiliser ses opposants sur les ondes de radios qui font de la haine du pauvre leur fonds de commerce?<\/p>\n

Rappelons que le projet de loi 70 vise \u00e0 obliger les personnes jug\u00e9es aptes au travail qui font une premi\u00e8re demande d\u2019aide sociale \u00e0 participer au programme Objectif emploi. Si une personne ne r\u00e9pond pas aux exigences du programme, elle pourrait voir sa prestation \u00eatre coup\u00e9e de 224 $ et devoir passer le mois avec 399 $. N\u2019est-il pas l\u00e0, le vrai scandale?<\/p>\n

\u00c7a suffit, le paternalisme bienveillant, Monsieur Blais!<\/h2>\n

\u00c0 quoi servait donc le processus de consultation qui vient de se terminer au terme d\u2019une ann\u00e9e, si le gouvernement entendait rester sourd \u00e0 tous les avis, d\u00e9monstrations, \u00e9tudes, t\u00e9moignages et m\u00e9moires qui apportaient critiques et suggestions de modification au projet de loi 70? Simple mascarade d\u00e9mocratique?<\/p>\n

Pourquoi le ministre a-t-il lui-m\u00eame \u00e9tir\u00e9, \u00e0 certains moments, l\u2019\u00e9tude d\u00e9taill\u00e9e du projet de loi en commission parlementaire si le premier ministre comptait, de toute fa\u00e7on, brandir la menace de l\u2019adoption sous le b\u00e2illon?<\/p>\n

Le ministre Blais a troqu\u00e9 ses responsabilit\u00e9s d\u2019intellectuel et adopt\u00e9 le r\u00f4le du \u00ab bon-p\u00e8re-de-famille-qui-sait-ce-qui-est-bon-et-que-l\u2019on-remerciera-quand-on-aura-compris-que-son-intransigeance-\u00e9tait-au-fond-pour-notre-bien \u00bb. En commission parlementaire, il a lui-m\u00eame d\u00e9fendu le \u00ab paternalisme bienveillant \u00bb de son projet de loi!<\/p>\n

Ce nouveau costume lui sied pourtant mal, tant il y est \u00e9triqu\u00e9. Lors d\u2019une rencontre priv\u00e9e avec le Collectif, le ministre s\u2019est d\u00e9fendu d\u2019avoir \u00e0 verser dans ce qu\u2019il appelle \u00ab l\u2019amour du pauvre \u00bb\u2026 nous reprochant sur son \u00e9lan d\u2019id\u00e9aliser les pauvres. Il a \u00e9galement pr\u00e9tendu que certaines personnes assist\u00e9es sociales vivent dans un \u00ab confort malsain \u00bb.<\/p>\n

Cette d\u00e9connexion d\u2019avec le r\u00e9el est aussi troublante que dramatique chez un ministre. D\u2019une part, ce n\u2019est pas de l\u2019amour du ministre Blais dont les personnes en situation de pauvret\u00e9 ont besoin, mais de son respect, de sa solidarit\u00e9 et, surtout, de son ouverture d\u2019esprit en lieu et place de ses pr\u00e9jug\u00e9s.<\/p>\n

D\u2019autre part, les primo-demandeurs d\u2019aide sociale seront certes les premiers \u00e0 subir les effets du projet de loi 70. Mais le Qu\u00e9bec tout entier finira par les subir lui aussi. L\u2019effritement des principes de justice sociale et de respect des droits de la personne a toujours des cons\u00e9quences bien r\u00e9elles pour la population. Encore la fin de semaine derni\u00e8re, des m\u00e9decins et d\u2019autres professionnels de la sant\u00e9<\/a> se sont ajout\u00e9s \u00e0 la longue liste des personnes et des organisations qui d\u00e9noncent le projet de loi 70.<\/p>\n

Que le ministre Blais soit celui \u00e0 qui le gouvernement a confi\u00e9 l\u2019\u00e9tude de la faisabilit\u00e9 d\u2019un \u00ab revenu minimum garanti \u00bb en dit long sur ses intentions : garantir le strict minimum, dont il ne cesse d\u2019abaisser la hauteur.<\/p>\n

Virginie Larivi\u00e8re, porte-parole du Collectif pour un Qu\u00e9bec sans pauvret\u00e9<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

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